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Durabilité, responsabilité : le CG 42 se repeint en vert

Septembre 2013

Avec l’Agenda 21, le Conseil général de la Loire faisait déjà dans le « développement durable ». Avec l’ISO 26000, il fait mieux et s’engage dans la « responsabilité sociétale ». Et le service public, dans tout ça ?


L’Agenda 21, c’était quoi déjà ?

Comme l’affirme la plaquette consacrée à l’Agenda 21 dans la Loire (sur le site cg42.fr ou en papier glacé), « Depuis longtemps, le Département de la Loire est engagé en faveur du développement durable » et il a donc « pris le parti de réaliser un Agenda 21 pour aller plus loin encore ». Aucun terme en vogue ne manque au document (1), ce qui lui donne un côté marketing institutionnel assez ronflant. On ne peut bien entendu qu’approuver la plupart des objectifs, comme ceux qui se rapportent à la préservation des espaces naturels, mais certains slogans sont surréalistes quand on connaît les pratiques internes (par exemple « Afficher une conduite exemplaire en matière de gestion du patrimoine interne » ; pendant ce temps, les déménagements continuent… (2)).

A part dans les quelques équipes directement concernées par la gestion des espaces naturels, l’Agenda 21 n’a de toute façon laissé aucun souvenir dans la plupart des services. Le développement durable, énième programme éphémère ?

La RSO, ça c’est sérieux.

Bien au contraire ! Lors du séminaire de l’encadrement du 28 avril 2013, notre institution passe à la vitesse supérieure en affichant son engagement dans la démarche de « responsabilité sociétale des organisations », également désignée sous le sigle RSO ou « ISO 26000 ».

Cette fois-ci, c’est du sérieux. La RSO correspond à « un consensus mondial sur les connaissances les plus avancées du sujet traité » (3). Elle renouvelle la conception du développement durable en étant « à la fois plus vaste et plus précise » (sic !).

Au-delà des simples questions d’environnement, la RSO s’étend à d’autres thématiques telles que les questions relatives aux usagers, la loyauté des pratiques et même les conditions de travail. Par ailleurs, elle est décrite comme indissociable d’une « démarche d’évaluation appro-fondie ». Au passage, le vocabulaire s’est enrichi de nouveaux termes : déontologie, éthique, morale, éco-responsabilité ou encore redevabilité. Comment ne pas être séduits ? Et pourtant…

S’évaluer : oui. Se faire contrôler : non !

Ce qui saute d’abord aux yeux, c’est le refus collatéral de s’inscrire dans une démarche de contrôle. Car l’évaluation des politiques publiques « ne doit pas être confondue avec le contrôle de gestion, l’inspection et l’audit qualité ». On va donc s’intéresser au sens général des interventions publiques (est-ce-que c’est utile ?) mais pas à la façon dont on « produit » le service public (est-ce-que ça marche bien ?).

Cette distinction serait parfaite si notre institution pratiquait les deux démarches. Mais la création de la Mission d’évaluation des politiques publiques (MEPP) coïncide justement avec la disparition du Service du contrôle de gestion (c.f. CTP du 7 juin 2013). Par ailleurs, il se trouve que la norme ISO 26000 est la seule norme ISO qui ne nécessite pas d’accréditation puisque les candidats s’évaluent eux-mêmes. Ça tombe bien !

En résumé : on abandonne les outils de contrôle interne et on invente l’évaluation à la carte.

Prenez maintenant n’importe quel agent du Conseil général. Demandez-lui s’il perçoit le sens de ce qu’il fait quand il répare une route, quand il reçoit une famille en difficulté ou encore quand il effectue des travaux de sécurité dans son établissement. Les réponses viendront facilement, avec évidence. Ce n’est pourtant pas évident pour nos dirigeants, qui ont besoin de créer une mission  pour le comprendre. Demandez maintenant aux agents s’ils trouvent que leur service fonctionne bien, de façon efficace, sans perte de temps ni gaspillage… Là, ça va devenir intéressant ! Malheureusement, ce point intéresse beaucoup moins nos dirigeants.

Le soudain intérêt pour la thématique de la responsabilité sociétale trahit ainsi à la fois une perte du sens du service public et un désintérêt pour la façon dont il s’exerce. Pendant ce temps, ce qui s’est perdu au niveau des agents, c’est la confiance dans une organisation qui se dégage de la réalité du terrain.

Recherche le politique désespérément

Si l’Agenda 21 a fait l’objet de plusieurs décisions de l’Assemblée départe-mentale entre 2010 et 2012, les politiques sont curieusement absents de la RSO : aucune allusion à cette démarche ou à la norme ISO 26000 n’apparaît dans les compte-rendus de l’activité de l’Assemblée départe-mentale, de la commission permanente ou même du comité technique paritaire. Cette absence du politique est pour le moins bizarre, pour une démarche qui prétend s’ériger en « cadre de cohérence globale ».

Il faut rappeler que la notion de responsabilité sociétale n’est pas née dans le secteur public, mais dans le cercle des multinationales, désireuses  d’afficher dans leurs activités et leurs stratégies des préoccupations sociales et environnementales. La coexistence des impératifs de rentabilité et d’intérêt général est bien entendu très ambigüe : « le concept de dévelop-pement durable peut rallier à peu près tous les suffrages, à condition souvent de ne pas recevoir de contenu trop explicite » (4). Pour les grandes entreprises, l’intérêt est cependant évident : « le développement durable n’est ni une utopie ni même une contestation, mais la condition de survie de l’économie de marché. » (5)

Le développement durable et la RSO servent donc à développer le mythe selon lequel l’économie de marché, devenue « responsable », est capable de s’autolimiter pour assurer le bien être collectif et la justice sociale. Si le secteur privé peut s’occuper de tout, il ne reste plus qu’à mettre à la benne (pardon : dans le bac recyclable) les notions de solidarité et de service public, en même temps que les mécanismes de redistribution des richesses et le financement des services collectifs, sans oublier le contrôle démocratique sur ce qui relève de l’intérêt général.

Mais qu’est-ce qu’on est venu faire dans cette galère ? Au mieux, la RSO est une tactique pour masquer l’incapacité de notre administration à se fixer des objectifs d’intérêt collectif. Au pire, c’est la fin du service public, orchestrée par ses cadres supérieurs avec la complicité plus ou moins passive des élus.



                                         
1-  En vrac : responsable, irréprochable, prioritaire, exemplaire, sensibilisation , cohésion, performance, transparence…
2- La gestion des locaux sera traitée dans un prochain Maux en mots.
3- Toutes les citations concernant la RSO sont extraite du Powerpoint « Une nouvelle dynamique au service des politiques publiques
départementales - Séminaire de l’encadrement du 18 avril 2013 » et du guide méthodologique « Responsabilité sociétale, Évaluation des politiques publiques, Agenda 21 : Pourquoi, comment ? » en ligne sur monportail.cg42.intra
4- Déclaration du sénateur Marcel Déneux, membre du groupe Union centriste, en 2005.
5- Louis Schweitzer, pédégé de Renault dans le mensuel "Enjeux Les Echos" en décembre 2004.
 

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