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Les AssFam : beaucoup de responsabilités, peu de reconnaissance

Janvier 2014
4 commentaires

L’assistant familial c’est la poêle Téflon de l’Aide Sociale à l’Enfance : il faut faire prendre la sauce sans s’attacher, s’attacher dans un souci de détachement… Attaché ou détaché, de toute façon le statut reste le même : contrat précaire et salaire aléatoire.

 
Un vrai métier
 
L’assistant familial (AssFam) exerce une profession d’accueil permanent, à son domicile et dans sa famille, d’enfants ou de jeunes majeurs. Le métier n’est pratiquement exercé que par des femmes, cependant les hommes n’en sont pas exclus. Il nécessite l’obtention d’un agrément, délivré par le Conseil général. Les vérifications effectuées lors d’entretiens et de visites à domicile portent notamment sur les aspects matériels (confort, hygiène, sécurité, environnement) et sur les aptitudes professionnelles (disponibilité, capacité d’organisation et d’adaptation à des situations variées, aptitude à la communication et au dialogue, capacités d’observation…).
 
Une fois l’agrément obtenu, l’Assfam peut être employé par une institution qui lui confiera un enfant, c'est-à-dire le plus souvent par le Conseil général dans le cadre de la protection de l’enfance.
 
Les assistants familiaux exercent donc un véritable métier salarié, dont la professionnalisation a été renforcée par une loi du 27 juin 2005. Pour autant, on ne peut pas vraiment parler d’un métier comme les autres.
 
Injonctions paradoxales
 
Etre assistant familial, c’est assurer l'ensemble des fonctions parentales quotidiennes pour un enfant : veiller à son alimentation, à son hygiène, à sa santé, à ses activités scolaires et de loisirs, à son sommeil et à son rythme de vie, à ses relations sociales, l'aider à acquérir une certaine discipline, à faire l'apprentissage des interdits et des limites… Mais sans être parent.
 
Il faut se préparer à l’idée que l’enfant confié n’est pas et ne sera jamais le sien, travailler pour qu’il puisse revenir un jour dans sa famille d’origine. Il faut donc pratiquer cet exercice d’équilibriste qui consiste à donner l’affection sans laquelle aucun enfant ne peut grandir, tout en faisant attention à ne pas  « trop s’attacher », au risque de se voir reprocher de ne pas être professionnel.
 
Etre assistant familial, c’est aussi faire un métier qui se déroule dans la sphère de la vie privée et ne repose pas sur un décompte d'heures travaillées. C’est embarquer toute la famille, conjoint et enfants, dans le métier de famille d’accueil. Or les mineurs accueillis ont généralement été retirés à leurs parents par décision de justice et pour des raisons graves : carences éducatives importantes, difficultés psychiques des parents, conflits familiaux violents, alcoolisme ou toxicomanie de l'un ou l'autre parent, maltraitance (abus sexuels, sévices corporels)… Ils conservent des séquelles de ces perturbations familiales, qu'ils introduisent souvent dans la famille d'accueil. Le risque est de voir l'enfant reproduire, dans son milieu d'accueil, les troubles vécus dans son milieu d’origine. 
 
Les témoignages ne manquent pas d’assistants familiaux en détresse par rapport à l’accompagnement d’enfants souffrant de problèmes de plus en plus compliquées et qui mettent à mal leur entourage, plus particulièrement leurs propres enfants, et les autres enfants accueillis (sans parler de leur couple….). Tout sauf une sinécure !
 
Un statut fragilisant
 
Ce métier, véritable sacerdoce, mériterait un statut en béton, avec des conditions matérielles et une protection à la hauteur de la fonction. Si la loi du 27 juin 2005 a indis-cutablement amélioré ses conditions d’exercice (formation, rémunération…), la profession reste pourtant mal payée et très précaire.
 
Une profession mal rémunérée :

Selon le décret du 29 mai 2006, la rémunération mensuelle d'un assistant familial accueillant un enfant de façon continue est constituée d’une base correspondant à la fonction globale d'accueil (au minimum 50 X le SMIC horaire) et d’une part supplémentaire pour l'accueil de chaque enfant (au moins 70 X le SMIC horaire par enfant).
 
Le  CG 42 a décidé d’aller au-delà de ce minimum. Ainsi, les assistants familiaux de la Loire perçoivent un salaire net de 1096 € pour un enfant, de 1604 € pour deux enfants (soit 225 € de plus que le minimum). La rallonge n’a pas été accordée spontanément, elle fait suite aux revendications du syndicat SUD lors de la grève de 2010 à l’ASE.
 
A ce salaire s’ajoutent diverses indemnités compensatoires, et là il faut bien dire que le compte n’y est pas : 14 € par jour pour l’entretien d’un bébé (nourriture, couches, bain…) et 38 € par mois pour son habillement ; 30 € pour son Noël et 11 € pour son anniver-saire… Essayez de faire autant avec vos propres enfants…
 
 
Une profession précaire

La situation des assistants familiaux est très dépendante du nombre d’enfants que le Conseil général veut bien leur confier. En cas de départ d’un enfant, l’AssFam voit en effet son salaire largement amputé. Bien plus : faute d’enfants accueillis, les textes prévoient une indemnité d’attente pendant 4 mois, à l’issue desquels l’assistant familial peut être licencié.
 
Le service de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) a toute compétence pour réorienter un enfant, ce qui peut résulter d’une multitude de causes. Certaines sont liées à la situation même de l’enfant : retour en famille, évolution du projet éducatif, rapprochement avec la fratrie… Mais d’autres peuvent prendre un caractère plus personnel.
 
En effet, une interprétation extensive du principe de précaution permet de retirer un enfant sur des critères très divers : attitude éducative jugée inadaptée, difficultés de communi-cation avec l’ASE, divergences d’appréciation… Puisque le retrait d’enfant constitue une simple mesure administrative, le Conseil général a tout a fait les moyens de sanctionner un assistant familial en le privant d’accueil puis en le licenciant, sans avoir à se justifier et sans que ce dernier n’ait la possibilité de faire valoir son point de vue. Le risque toujours présent est un détournement de la procédure de licenciement pour absence d’enfant, dissimulant une procédure disciplinaire.
 
On le voit : le contrat spécifique des AssFam les met à la merci d’une simple décision administrative… Cas tout à fait exceptionnel dans la fonction 
publique !
 
Une profession méprisée
 
La loi a beau affirmer qu’ils sont « membres à part entière » des équipes de l’ASE, (Article L221-2 du Code de l’Action Sociale et des Familles), les AssFam restent traités au sein du Conseil général comme des semi-professionnels, souvent corvéables à merci, dont la compétence est fréquemment mise en doute.
 
Au sein du service de l’ASE, la situation de l’enfant est souvent abordée, les décisions souvent prises, sans que l’assistant familial soit présent, et même parfois sans qu’il soit consulté. Bien sûr, la situation particulière de travailleur à domicile ne leur permet pas d’être toujours présent aux diverses rencontres. Mais cette réalité matérielle ne doit pas masquer une tendance à les écarter, une difficulté à prendre en compte leur avis.
 
Les AssFam doivent ainsi accepter que certaines décisions et analyses soient entérinées sans qu’ils puissent expliquer leur avis et sans avoir le droit de les remettre en cause, tout en devant accepter la critique fréquente de leur propre attitude. Dans certains cas, l’accueil d’un enfant les oblige à répondre à de véritables interrogatoires policiers, à attendre plusieurs mois une décision d’accueil dans l’incertitude,  alors qu’à d’autres moments, ils peuvent être sollicités dans l’urgence et accueillir un enfant dont personne d’autre ne veut, sans préparation. Le niveau de dévouement et de flexibilité qu’on exige d’eux est sans équivalent.
 
Cette situation est autorisée par la précarité du contrat des AssFam, qui donne à l’administration un pouvoir sur eux qu’elle n’a sur aucun autre professionnel. Le statut particulier d’agent contractuel ne leur donne pas de poids face à leur employeur et les encourage surtout à « la fermer ».
 
Il serait trop facile, comme la direction du Pôle Vie Sociale l’insinue souvent, de rendre les professionnels de l’ASE responsables des difficultés. Ces travailleurs sociaux, absorbés par leur charge de travail et souvent contraints de privilégier les urgences, en butte à un turn-over affolant qui témoigne du peu d’attractivité de leur métier, n’ont généralement ni les moyens ni le temps d’assurer un suivi correct des familles d’accueil, qui soit suffisamment protecteur pour les enfants et respectueux pour les AssFam. Il est heureux que les uns et les autres réussissent à préserver une bonne collaboration et soient le plus souvent capables d’éviter le piège du conflit. Mais à quel prix ?
 
AssFam et travailleurs sociaux sont dans la même  galère du défaut de projet de service et de moyens, et on ne peut malheureusement pas dire que cette situation émeuve beaucoup la Direction du Pôle Vie Sociale, ni les élus. Par plusieurs courriers au président (le 23 octobre 2011, le 23 Aout 2012), par de nombreuses interventions en CTP (notamment le 9 mars 2012), les représentants de SUD ont alerté notre institution sur la situation de ces professionnels. Les sujets abordés étaient nombreux et divers : protection des membres de leur famille notamment lorsque leurs enfants sont victimes d’agression de la part des enfants confiés, droit à la formation, droit à l’information, mise en place effective du projet de service de l’ASE pour permettre un suivi réel par les TS et des modalités de fonctionnement uniformisée entre équipes de l’ASE, augmentation des frais financiers qui ne rentrent pas dans les indemnités alloués par le service… La lettre du 23 août 2012 au président se concluait ainsi : « Le syndicat SUD CT 42 espère que vous prendrez les demandes des assistants familiaux en compte en considérant ce personnel comme des salariés à part entière, en appliquant l’ensemble des engagements que vous avez pris à leur égard, en permettant à leurs représentants du personnel SUD CT 42 de faire leurs revendications en CTP. » Une entrevue était demandée…  Aucune réponse ne nous est parvenue. Comment faudrait-il s’exprimer pour en avoir une ?
 
Les AssFam bientôt en voie de disparition ?
 
Aujourd’hui, tout le monde plébiscite les assistants familiaux : c’est un mode d’accueil personnalisé, bien adapté aux besoins de sécurité et d’attachement de la plupart des enfants placés, notamment les plus petits. De plus, il est économique : au moins 30% moins cher que le placement en établissement.    
 
Pourtant, dans les faits, peu d’efforts sont faits pour le rendre plus attractif. Beaucoup démarrent la profession et arrêtent après quelques mois, effarés moins par les difficultés des enfants qu’on leur confie que par l’absence de soutien de la part de leur employeur. Or la profession regroupe beaucoup de personnes de cinquante ans et plus, qui partiront prochainement à la retraite et ne sont pas remplacées.
 
Manquera-t-on bientôt de volontaires ? Faudra-t-il rouvrir des foyers ?

 
 

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Commentaires :

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  • Anonyme dit :
    08/8/2023 à 1h 02min

    Bonjour, je suis fille d’une mère Assfam, Quand allez vous arrêter de privilégier le bonheur d’enfants placés contre celui d’enfant bien dans sa famille. Vous clamez la bonne construction d’un enfant dans un nouveau foyer mais en dépit de détruire le bon développements de ceux qui sont enfants de famille d’accueil. Moi 15ans je vis depuis maintenant 3ans un enfer au quotidien il est pour moi très dur de me construire dans un foyer qui met toute sa patience dans un enfant qui a mes yeux n’est rien au détriment de mon bien être à moi et moi je ne reçois plus de patience car toute celle ci a été épuisé pour cet enfant. Quand allez vous aussi mettre en valeur le mal être des enfants d’Assfam. Il est grave, très grave que l’on me répète sans cesse que c’est à moi de faire des efforts et que ce n’est pas de la faute de l’enfant, il est grave que la psychologue recruté spécialement pour les Assfam ne prenne absolument pas ma défense mais celle de l’enfant. A quand le malheur de nous enfant d’assistant familial va être enfin arrêter d’être étouffer sous des excuses. Je ne suis plus chez moi, je vis très mal mon adolescence a cause du travail de ma mère, mes parents se plaignent de mon comportement qui provient tout simplement de leur choix d’avoir ignorer ma souffrance pour aider un inconnu. Alors je prend la parole, pour toutes ces souffrances que nous endurons qu’elles soit pour certains physique, et d’autre psychologique, quand serons nous entendus ? Je n’en peux plus d’entendre que cet enfant qui est chez moi est malheureux car c’est entièrement faux, c’est un enfant horruble, vicieux de son âge de 6ans, qui n’a aucune reconnaissance envers tout ce que nous lui avons offert, qui a fait de ma vie un enfer, un enfant qui a une jalousie profonde envers moi alors que je ne fait qu’être dans MA famille, cet enfant qui depuis 3ans fait tout pour m’éloigner de mes parents, alors non ils ne sont pas tous malheureux et traumatisés. En revanche moi, fille d’une mère Assfam je suis malheureuse, brisée de ne pas être comprise, épuisée d’être entourée de personne prenant La Défense de cet enfant, et surtout marquée à vie par ce passage, cette simple décision de vouloir aider un enfant au détriment de m’avoir détruite moi. Avec une énorme douleur à la poitrine et beaucoup de détresse, une fille d’Assfam..

  • Assfam 36 dit :
    26/7/2020 à 19h 59min

    Bonjour asfam77. Très juste vos remarques. Il est temps qu'ils se réveillent, ces soi disant, défenseurs des droits de l'enfant. Combien d'enfants se retrouvent dans des familles maltraitantes ? Combien d'ados se retrouvent dans la rue car ils n'ont plus droit à rien à leurs 18ans?Nous, les assfam honnêtes, si on ose lever le doigt pour les aider, on est jugés comme des "fouteurs de merdes qu'il faut absolument éliminer. Voilà. Ça fait du bien de décharger ce que l'on a contenu depuis trop longtemps. Assfam 36

  • Posteur anonyme dit :
    26/7/2020 à 19h 38min

    Bonjour asfam77. Très juste vos remarques. Il est temps qu'ils se réveillent, ces soi disant, défenseurs des droits de l'enfant. Combien d'enfants se retrouvent dans des familles maltraitantes ? Combien d'ados se retrouvent dans la rue car ils n'ont plus droit à rien à leurs 18ans?Nous, les assfam honnêtes, si on ose lever le doigt pour les aider, on est jugés comme des "fouteurs de merdes qu'il faut absolument éliminer. Voilà. Ça fait du bien de décharger ce que l'on a contenu depuis trop longtemps. Assfam 36

  • assfam77 dit :
    21/6/2018 à 14h 31min

    Bonjour, Je suis une de ces assistantes familiales dans certains départements comme le mien nous n'avons rien pour les anniversaires par exemple il y va de notre bon sens,idem pour le maquillage,rasoirs et autres denrées dites de luxe mais qui dans la vie d'une adolescente est "vital".Idem indemnité d'entretien de 13€ par jour exemple concret ma grande est en CFA soit 6,80€ le repas si je me contentais des 13€ par jour elle n'aurai pas grand chose.En dehors de nos payes dites énormes pour certains ne connaissant rien à notre métier desquelles il ne reste rien à la fin du mois quand on se donne à fond dans l'éducation et l'égalité de ces enfants face aux autres un autre point est un vrai repoussoir pour exercer ce métier.Qui aimerai travailler 7j/7 24H/24 en étant payé 5h par jour?Sans aucun jour de repos hebdomadaire même mensuel car c'est ce que nous vivons,on nous dit que nous avons 35j de CP (comme tout le monde)mais les jours de repos hebdomadaires devraient ils en être décompté?Et encore si cela ne va pas dans l'intérêt de l'enfant on nous les refuse.Nous tenons par les nerfs mais quand ceux ci lâchent nous sommes bien seules et vite rabaissées au rang de moins que rien,cela n'est pas étonnant que peu de nouvelles candidatures soient déposées et dans celles ci beaucoup arrêtent dans les 5 premières années.Qui sera encore là dans 15 ans quand les 3/4 des collègues seront à la retraite si rien ne change aujourd'hui?Avant de parler de professionnalisation ou formation pensons d'avantage à notre quotidien afin d'avoir au moins le minimum légal auquel nous avons le droit de prétendre comme n'importe quel salarié normal.

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